Mise en œuvre de tests paramétriques pour la détermination du comportement à long terme de résidus d’incinération

Contact : Laboratoire de Recherche en Chimie Marine des Organométalliques, UTV, B.P. 132, 83957 LA GARDE cedex, Loïc GUERIN et Jean Benaïm, Tél. : 04.94.14.23.44.


INTRODUCTION

A partir de 2002, les décharges ne seront autorisées à accueillir que des déchets ultimes tels que des résidus d’incinération stabilisés. Dans cette optique, des travaux de recherches sont entrepris affin de caractériser ces déchets ainsi que leurs comportements à long terme selon la méthodologie de la norme AFNOR X31-407 déchets, méthodologie pour la détermination du comportement à long terme (1). Cela implique la mise en place d’une batterie de tests de simulation du comportement à long terme. Notre étude s’est attachée plus particulièrement à la réalisation de tests paramétriques sur des mâchefers.

LES TESTS PARAMÉTRIQUES
Lors de la réalisation de tests paramétriques, le milieu impose les conditions d'extraction au résidu. Ces contraintes imposées aux résidus doivent correspondre à un (des) scénario(s) de stockage des résidus. Les tests effectués sont les suivants :
- l’extraction séquentielle permet de définir les spéciations des éléments mineurs (et majeurs pour certains d’entre eux), le comportement des résidus à court et moyen/long terme et le comportement selon les conditions de stockage de ces résidus ;
- l’extraction totale ou minéralisation permet de mesurer la quantité totale des éléments mineurs (et majeurs) présents dans le résidu. Elle valide de l’extraction séquentielle et l’extraction à pH maintenu.
- les extractions (ou lixiviations) à pH maintenu permettent de préciser les spéciations des éléments mineurs et majeurs ainsi que le comportement à court et moyen/long terme des résidus.

L’EXTRACTION SÉQUENTIELLE
 But : déterminer la mobilité des métaux présents dans les résidus, en suivant un ordre d’extractions de plus en plus «violentes» (2, 3). Cela peut correspondre à un scénario de disposition en décharge, avec possibilité de modification de l'environnement du déchet (lessivage, perte de la  réserve alcaline... ).
- 1ère fraction : relargage des composés selon des phénomènes de sorption-désorption. Fraction immédiatement disponible par lessivage, libérable sur le court terme ;
- 2ème fraction : relargage des composés par modification du pH (milieu acide). Fraction potentiellement disponible par lessivage en conditions acides, libérable sur le long terme ;
- 3ème fraction : relargage des composés en condition réductrice. Fraction non disponible en conditions normales ;
- 4ème fraction : relargage des composés en condition oxydante. Fraction non disponible en conditions normales, ou cas particulier d'une oxydation biologique ;
- 5ème fraction : composés inclus dans la matrice. Fraction non disponible.
Seules les deux premières fractions sont supposées lessivables en conditions normales (4).

L’EXTRACTION TOTALE
Elle permet de déterminer la concentration totale d’un élément donné dans le résidu. C’est un élément de comparaison et de validation  de l’extraction séquentielle et de l’extraction à pH maintenu.
L’extraction totale est réalisée d'après le protocole de la norme AFNOR NF X31-151 (minéralisation) avec de «l’eau régale» (aqua regia) à chaud.

LA LIXIVIATION A pH MAINTENU
Elle peut donner des informations sur les possibilités de dissolution des éléments majeurs et surtout des éléments mineurs. La dissolution des éléments mineurs (métaux lourds) est en effet essentiellement liée au pH.
On s’intéressera plus particulièrement aux quantité de métaux libérés lors de la lixiviation au pH initial (lixiviation sans ajout d’acide, équivalent à la 1ère fraction de l’extraction séquentielle.) et à pH=5 (équivalent à la 2ème fraction de l’extraction séquentielle).

PHÉNOMÈNES MIS EN ÉVIDENCES
Les résultats précédents sont validés et complétés par d’autres travaux réalisés à l’Université de Toulon et du Var : caractérisation des résidus solides avant et après la réalisation de tests (établissement de la «carte d’identité») (5), réalisation de tests intégraux sur les même résidus (6). La cohérence entre les tests paramétriques et les tests intégraux, validée par l'analyse des résidus solides, permet de définir un comportement dans le temps des différents éléments chimiques analysés dans les résidus d'incinération étudiés :
- une première phase d’extraction très rapide d’une faible quantité de métaux lourds associés aux alcalins et alcalino-terreux (NaCl, KCl...) : 1ère fraction de l’extraction séquentielle, lixiviations jusqu’à pH=8, polluants disponibles à court terme ;
- une deuxième phase d’extraction plus lente d’une assez grande quantité de métaux lourds liés aux carbonates et aux hydroxydes, à la solubilité plus faible : 2ème fraction de l’extraction séquentielle, lixiviations entre pH=8 et pH=5, polluants disponibles sur le long terme jusqu’à élimination de la réserve alcaline .
- le reste des métaux n’est pas disponible dans des conditions normales de stockage de ces résidus d’incinération.

DÉBOUCHÉS INDUSTRIELS ENVISAGEABLES
La simulation du comportement à long terme des résidus est un outil décisionnel qui permet de choisir les meilleurs procédés de stabilisation en vue d’un stockage en décharge ou d’une valorisation (BTP, génie civil...).


RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

(1)  AFNOR. (1995) norme AFNOR X31-407 déchets, méthodologie pour la détermination du comportement à long terme. normalisation française, 12 pp.

(2)  Tessier A., Campbell P.G.C., et Bisson M. (1979) sequential extraction procedure for the speciation of particulate metals. Analytical Chemistry 51(7), 844-851.

(3)  CNIM. (1995) contrat CNIM/950139, mise au point d'un protocole d'extraction séquentielle sur résidus de combustion. Bottzeck O., Praud A., Benaïm J.Y.

(4)  Sawell S.E. et Constable T.W. (1989) the national incinerator testing and evaluation program : characterization of residues from a refuse derived fuel combustion system and a modular municipal waste incinerator. International Conference on Municipal Waste Incineration, 2B-45-62.

(5)  Pierre C. (1998) rapport intermédiaire de thèse ADER/CNIM juin 1998, étude de systèmes solides multiphasés complexes et de leurs évolutions : microstructures, mobilités ioniques, évolutions chimiques et mécaniques, modélisations des évolutions. Université de Toulon et du Var, Laboratoire des Matériaux Multiphasés et Interfaces, CNIM.

(6)  Montigny L. (1998) rapport intermédiaire de thèse ADER/CNIM, juin 1998, Comportement à long terme des résidus de la combustion. Université de Toulon et du Var, Laboratoire de Recherche en Chimie Marine sur les Organométalliques, CNIM.